17BX02825

Lecture du 19 décembre 2019

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Coussay-les-Bois a demandé au tribunal administratif de Poitiers d’annuler l'arrêté du 26 mai 2015 par lequel le préfet de la Vienne a délivré à la société Technique solaire Invest 9 le permis de construire qu’elle avait sollicité pour la réalisation de trois bâtiments avec panneaux photovoltaïques.

Par un jugement n°1502374 du 21 juin 2017, le tribunal administratif de Poitiers a annulé cet arrêté.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 17 août 2017, et des mémoires complémentaires, enregistrés les 23 novembre 2018, 21 décembre 2018, 1er mars 2019 et 3 avril 2019, la société Technique solaire Invest 9, représentée par la SCP Ten France, demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 21 juin 2017 ;

2°) de rejeter la demande présentée par la commune de Coussay-les-Bois devant le tribunal administratif de Poitiers ;

3°) à titre subsidiaire, de faire application de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Coussay-les-Bois une somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.


Considérant ce qui suit :

1. La société Les Nauds souhaite créer un élevage de 1 200 taurillons associé à une unité de méthanisation sur le territoire de la commune de Coussay-les-Bois (Vienne). Le 18 décembre 2014, la société Technique solaire Invest 9 a déposé une demande de permis de construire pour la réalisation trois bâtiments de stabulation couverts de panneaux photovoltaïques, destinés à accueillir le cheptel et le matériel de la société Les Nauds. Par arrêté du 26 mai 2015, le préfet de la Vienne lui a accordé ce permis. La société Technique solaire Invest 9 relève appel du jugement du 21 juin 2017 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a annulé cet arrêté à la demande de la commune de Coussay-les-Bois.

Sur le bien-fondé des moyens retenus par le jugement attaqué :

2. Pour annuler le permis de construire du 26 mai 2015, les premiers juges ont estimé que le dossier de demande de permis de construire n’avait pas mis le préfet à même d’apprécier la conformité du projet à la réglementation applicable concernant le raccordement de celui-ci aux réseaux publics et que le projet en litige méconnaissait les articles R. 111-2 et R. 111-8 du code de l’urbanisme.

3. En premier lieu, aux termes de l’article R. 431-9 du code de l’urbanisme : « Le projet architectural comprend également un plan de masse des constructions à édifier ou à modifier coté dans les trois dimensions. Ce plan de masse fait apparaître les travaux extérieurs aux constructions, les plantations maintenues, supprimées ou créées et, le cas échéant, les constructions existantes dont le maintien est prévu. / Il indique également, le cas échéant, les modalités selon lesquelles les bâtiments ou ouvrages seront raccordés aux réseaux publics ou, à défaut d'équipements publics, les équipements privés prévus, notamment pour l'alimentation en eau et l'assainissement (…) ».

4. La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l’ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l’urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n’est susceptible d’entacher d’illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l’appréciation portée par l’autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

5. Le projet global consiste, sur un terrain composé de six parcelles, cadastrées section AB n° 1, 2, 3, 4, 5 et 6, en la création d’une unité de méthanisation, composée de cinq éléments, autorisée par le permis de construire en litige dans l’instance 17BX02821, accordé à la SCEA Les Nauds, et de trois bâtiments de stabulation couverts de panneaux photovoltaïques, destinés à accueillir le cheptel et le matériel de la SCEA Les Nauds, dont la construction a été autorisée par le permis de construire délivré à la Société technique solaire Invest 9, en litige dans la présente instance. Les activités d’élevage, de méthanisation et de compostage ont également donné lieu à la délivrance à la SCEA Les Nauds d’une autorisation au titre des installations classées pour la protection de l’environnement, en litige dans l’instance 17BX02824.

6. D’une part, la notice jointe au dossier de demande se borne à indiquer « pas de réseau d’alimentation en eau potable ». Toutefois, et en l’absence au dossier de solution alternative pour l’alimentation du cheptel en stabulation dans les bâtiments projetés, ces derniers doivent nécessairement être raccordés au réseau. L’arrêté en litige vise l’avis du 19 janvier 2015 du Syndicat des eaux et de l’assainissement de la Vienne, en le présentant comme favorable, alors que cet avis se borne à indiquer que « les terrains ne sont pas desservis par un réseau d’eau potable situé au droit du terrain ». Il ressort des pièces du dossier que la canalisation d’eau potable la plus proche passe le long de la route départementale 725 dont le terrain d’assiette du projet est séparé par la parcelle cadastrée ZA n° 10, dont il n’est pas sérieusement contesté qu’elle appartient à l’un des associés de la SCEA Les Nauds, un chemin et les parcelles qui constituent le terrain d’assiette du permis en litige dans l’instance 17BX02821. La notice jointe au dossier de demande de ce dernier permis, versée dans la présente instance et soumise au contradictoire, se borne à prévoir qu’un « réseau de canalisations sera créé afin d’alimenter la parcelle de l’élevage ». Cette canalisation n’est matérialisée sur aucun plan du dossier de demande. Dans ses écritures en défense devant le tribunal administratif, le préfet de la Vienne renvoie à l’avis rendu par le service des eaux de la Vienne à propos du permis en litige dans l’instance 17BX02821, selon lequel un compteur pourra être posé au niveau de la route départementale sur lequel pourra être branchée une canalisation privée qui devra traverser la parcelle cadastrée ZA n° 10 jusqu’au terrain d’assiette du projet. Il ressort des pièces du dossier qu’était joint à cet avis un schéma sur lequel la canalisation reliant le réseau d’eau au terrain d’assiette du projet traverse d’autres parcelles que celle indiquée dans l’avis ainsi que le chemin précédemment évoqué. Aucune autorisation ne figure au dossier concernant la possibilité de traverser les parcelles, quelles qu’elles soient, séparant le projet de la route départementale ainsi que le chemin, dont il ressort de l’avis de la commune sur le projet en litige dans l’instance 17BX02821 qu’il est pour partie un chemin rural et pour partie un chemin d’exploitation. Dans ces conditions, le dossier de demande ne saurait être regardé comme ayant mis le préfet à même d’apprécier la conformité du projet à la règlementation applicable concernant le raccordement du projet au réseau public d’eau potable.

7. D’autre part, aucune pièce du dossier de demande ne traite de la question des eaux usées. Si le préfet soutenait en défense en première instance qu’aucun local à usage de bureau n’étant prévue, aucun système d’assainissement n’avait été envisagé, il ressort de l’étude d’impact figurant dans le dossier de demande d’autorisation au titre des installations classées pour la protection de l’environnement, versée dans la présente instance et soumise au contradictoire, que le projet global décrit au point 5 comprend un local sanitaire destiné au personnel, comprenant vestiaires, douches, lavabos et WC. L’étude d’impact indique d’ailleurs à sa page 316 que les eaux usées produites dans ce local seront collectées et traitées par un système d’assainissement individuel. Ce local et ce système d’assainissement n’apparaissent ni sur les plans du dossier de demande concernant l’unité de méthanisation, ni sur ceux des trois bâtiments d’élevage équipés de panneaux photovoltaïques. En outre, la question de l’évacuation et du traitement d’éventuelles eaux souillées générées dans ces bâtiments de stabulation, ne serait-ce qu’au titre de leur nettoyage, n’est abordée par aucune pièce du dossier. Dans ces conditions, le préfet n’a pas non plus été mis à même d’apprécier la conformité du projet à la règlementation applicable concernant le traitement des eaux usées.

8. En revanche, la notice jointe au dossier de demande indique que le local technique dénommé « shelter » « sera raccordé au PDL situé au sud du bâtiment ». L’arrêté en litige vise l’avis favorable du 14 janvier 2015 du service en charge du réseau de distribution dont il ressort que des travaux d’électrification sont nécessaires pour assurer la desserte du projet à partir de la ligne à haute tension existant à proximité et qui surplombe les parcelles cadastrées section AB n° 5, 6 et 7. Dans ces conditions, le dossier de demande a mis le préfet à même d’apprécier la conformité du projet à la règlementation applicable concernant le raccordement du projet au réseau électrique.

9. Dans ces conditions, c’est à bon droit que les premiers juges ont regardé comme fondé le moyen tiré du caractère incomplet du dossier de demande, en tant seulement qu’il concerne le raccordement du projet au réseau d’eau potable et les équipements nécessaires à l’assainissement.

10. En deuxième lieu, aux termes de l’article R. 111-2 du code de l’urbanisme : « Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ».

11. Il ressort des pièces du dossier que le service départemental d’incendie et de secours a exigé que la réserve d’eau prévue sur le site soit complétée par un système de réalimentation à partir d’une source, d’un réseau d’eau potable ou tout système équivalent. Compte tenu de ce qui a été dit au point 6 concernant le raccordement incertain du projet au réseau public d’eau potable, et en l’absence au dossier de solution alternative, la protection du site du projet contre le risque d’incendie ne saurait être regardée comme assurée. Dans ces conditions, c’est à bon droit que les premiers juges ont regardé comme fondé le moyen tiré de l’erreur manifeste d'appréciation commise par le préfet au regard de l’article R. 111-2 du code de l’urbanisme en délivrant le permis en litige.

12. En troisième lieu, aux termes de l’article R. 111-8 du code de l’urbanisme : « L'alimentation en eau potable et l'assainissement des eaux domestiques usées, la collecte et l'écoulement des eaux pluviales et de ruissellement ainsi que l'évacuation, l'épuration et le rejet des eaux résiduaires industrielles doivent être assurés dans des conditions conformes aux règlements en vigueur ».

13. D’une part, si l’article R. 111-1 du code de l’urbanisme dispose que les dispositions des articles R. 111-5 à R. 111-19 « ne sont pas applicables dans les territoires dotés d'un plan local d'urbanisme ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu », une carte communale ne constitue pas un document d'urbanisme tenant lieu de plan local d'urbanisme pour l'application de cet article. Or, il ressort des pièces du dossier que la commune de Coussay-les-Bois est dotée d’une carte communale.

14. D’autre part, ainsi qu’il a été dit au point 7, il ne ressort pas des pièces du dossier que les eaux usées générées par le projet feront l’objet d’un assainissement dans des conditions conformes à la règlementation en vigueur. Dans ces conditions, c’est à bon droit que les premiers juges ont regardé comme fondé le moyen tiré de la méconnaissance, par le permis en litige, des dispositions de l’article R. 111-8 du code de l’urbanisme.

Sur l’application de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme :

15. Aux termes de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme : « Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. Le refus par le juge de faire droit à une demande de sursis à statuer est motivé ».

16. Lorsque le juge d’appel estime qu’un moyen ayant fondé l’annulation du permis litigieux par le juge de première instance est tiré d’un vice susceptible d’être régularisé, et qu’il décide de faire usage de la faculté qui lui est ouverte par l’article L. 600-5-1, il lui appartient, avant de surseoir à statuer sur le fondement de ces dispositions, de constater préalablement qu’aucun des autres moyens ayant, le cas échéant, fondé le jugement d’annulation, ni aucun de ceux qui ont été écartés en première instance, ni aucun des moyens nouveaux et recevables présentés en appel, n’est fondé et n’est susceptible d’être régularisé et d’indiquer dans sa décision de sursis pour quels motifs ces moyens doivent être écartés.

17. En premier lieu, le préfet de la Vienne a, par arrêté du 16 juin 2014, régulièrement publié au recueil des actes administratifs des services de l’Etat dans le département, donné délégation à M. L== P==, sous-préfet de Châtellerault et signataire de l’arrêté en litige, à l’effet de signer les arrêtés de permis de construire des communes de l’arrondissement sans plan d’occupation des sols ou plan local d’urbanisme, telle la commune de Coussay-les-Bois. Dans ces conditions, le moyen tiré de l’incompétence du signataire de l’arrêté en litige doit être écarté.

18. En deuxième lieu, aux termes de l’article L. 111-1-2 du code de l’urbanisme, en vigueur à la date de l’arrêté en litige : « I.- En l'absence de plan local d'urbanisme ou de carte communale opposable aux tiers, ou de tout document d'urbanisme en tenant lieu, seuls sont autorisés, en dehors des parties actuellement urbanisées de la commune : (…) 2° Les constructions et installations nécessaires à l'exploitation agricole (…) / II.- La construction de bâtiments nouveaux mentionnée au 1° du I du présent article et les projets de constructions, aménagements, installations et travaux mentionnés aux 2° et 3° du même I ayant pour conséquence une réduction des surfaces situées dans les espaces autres qu'urbanisés et sur lesquelles est exercée une activité agricole ou qui sont à vocation agricole doivent être préalablement soumis pour avis par le représentant de l'Etat dans le département à la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers prévue à l'article L. 112-1-1 du code rural et de la pêche maritime (…) ».

19. Ainsi qu’il a été dit au point 13, la commune de Coussay-les-Bois est dotée d’une carte communale. Dans ces conditions, le préfet n’était pas tenu de saisir pour avis sur le projet en litige la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers.

20. En troisième lieu, aux termes de l’article R. 431-5 du code de l’urbanisme : « La demande de permis de construire précise : (…) f) La surface de plancher des constructions projetées (…) ». Aux termes de l’article L. 112-1 du même code, alors en vigueur : « (…) la surface de plancher de la construction s'entend de la somme des surfaces de plancher closes et couvertes, sous une hauteur de plafond supérieure à 1,80 m, calculée à partir du nu intérieur des façades du bâtiment (…) ». Aux termes de l’article R. 112-2 du même code, alors en vigueur : « La surface de plancher de la construction est égale à la somme des surfaces de planchers de chaque niveau clos et couvert, calculée à partir du nu intérieur des façades après déduction : (…) 6° Des surfaces de plancher des locaux techniques nécessaires au fonctionnement d'un groupe de bâtiments ou d'un immeuble autre qu'une maison individuelle au sens de l'article L. 231-1 du code de la construction et de l'habitation, y compris les locaux de stockage des déchets ».

21. Il ressort des pièces du dossier que les éléments composant le projet en litige sont des bâtiments non clos. En outre le « shelter » est un local technique au sens des dispositions du 6° de l’article R. 112-2 du code de l’urbanisme. Dans ces conditions, le projet ne crée pas de surface de plancher, ainsi que la pétitionnaire l’a indiqué dans le cadre 5.5 du formulaire Cerfa de demande.

22. En quatrième lieu, aux termes de l’article R. 431-8 du code de l’urbanisme : « Le projet architectural comprend une notice précisant : (…) 2° Les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages, faisant apparaître, en fonction des caractéristiques du projet : (…) c) Le traitement des constructions, clôtures, végétations ou aménagements situés en limite de terrain (…) f) L'organisation et l'aménagement des accès au terrain, aux constructions et aux aires de stationnement ». Aux termes de l’article R. 431-10 du même code : « Le projet architectural comprend également : (…) c) Un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain (…) ».

23. D’une part, la commune ne peut utilement se prévaloir de ces dispositions, relatives à l’accès du site à la voie, en invoquant les caractéristiques du chemin qui dessert le projet. D’autre part, la notice jointe au dossier de demande indique que l’accès existe déjà, lequel est visible sur les photographies de l’état initial du terrain et sur les documents graphiques représentant le projet. Enfin, il ressort des documents graphiques que le projet ne prévoit pas de clôtures.

24. En revanche, si le local technique dénommé shelter figure sur le plan de masse, il n’est représenté ni sur les documents graphiques ni sur les plans de coupe ni sur les plans de façades. Aucun élément concernant ses dimensions et son aspect ne figure dans la notice. Dans ces conditions, le préfet n’a pas non plus été mis à même d’apprécier la conformité du projet à la règlementation applicable concernant ce local technique.

25. En cinquième lieu, d’une part, la commune intimée ne peut utilement se prévaloir à l’encontre d’un permis de construire non soumis à étude d’impact, ainsi qu’il sera dit ci dessous, des dispositions de l’article R. 122-14 du code de l’environnement, qui plus est dans leur rédaction qui n’était plus en vigueur à la date de l’arrêté en litige dans la présente instance.

26. D’autre part, l’obligation de joindre l'étude d'impact au dossier de demande de permis de construire prévue par l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme ne concerne que les cas où l'étude d'impact est exigée en vertu des dispositions du code de l'environnement pour des projets soumis à autorisation en application du code de l'urbanisme.

27. Il ressort du tableau figurant en annexe de l’article R. 122-2 du code de l’environnement, dans sa version, applicable en l’espèce, issue du décret n° 2011-2019 du 29 décembre 2011, que les travaux ou constructions soumis à permis de construire, sur le territoire d'une commune dotée, à la date du dépôt de la demande, d'une carte communale n'ayant pas fait l'objet d'une évaluation environnementale (36°) sont soumis à étude d’impact lorsque « l’opération crée une SHON (surface hors œuvre nette) supérieure ou égale à 40 000 mètres carrés ». Or, même en tenant compte des constructions autorisées par le permis de construire en litige dans l’instance 17BX02821, et à supposer que le projet ait vocation à comporter des locaux sanitaires, ainsi qu’il a été dit au point 7, il ne ressort pas des pièces du dossier que ces locaux soient susceptibles de porter la SHON du projet à plus de 40 000 m². Dès lors, le dossier de demande de permis de construire déposé par la SCEA Les Nauds n’avait pas à comprendre une étude d’impact.

28. En sixième lieu, aux termes de l’article L. 122-1-1 du code de l’environnement : « Lorsqu'un projet de construction, de travaux, d'ouvrage ou d'aménagement nécessitant une étude d'impact en application de l'article L. 122-1 n'est soumis, en vertu du présent livre ou en vertu des dispositions législatives spécifiques au projet, ni à enquête publique ni à une autre procédure de consultation du public, le pétitionnaire ou le maître de l'ouvrage met à la disposition du public, avant toute décision d'autorisation, d'approbation ou d'exécution, l'étude d'impact relative au projet, la demande d'autorisation, l'indication des autorités compétentes pour prendre la décision et celle des personnes auprès desquelles peuvent être obtenus les renseignements sur le projet ainsi que, lorsqu'ils sont rendus obligatoires, les avis émis par une autorité administrative sur le projet (…) ».

29. Compte tenu de ce qui vient d’être dit au point 27, la commune intimée ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l’article L. 122-1-1 du code de l’environnement.

30. En septième lieu, aux termes de l’article L. 111-4 du code de l’urbanisme, en vigueur à la date de l’arrêté en litige : « Lorsque, compte tenu de la destination de la construction ou de l'aménagement projeté, des travaux portant sur les réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou de distribution d'électricité sont nécessaires pour assurer la desserte du projet, le permis de construire ou d'aménager ne peut être accordé si l'autorité compétente n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés ».

31. D’une part, ainsi qu’il a été dit au point 6, il ressort des pièces du dossier, en particulier de l’avis du service des eaux de la Vienne, que le projet en litige peut être raccordé au réseau d’eau potable sans extension de ce dernier. D’autre part, ainsi qu’il a été dit au point 7, le projet global est censé inclure un dispositif d’assainissement non collectif. Enfin, compte tenu de l’avis, cité au point 8, du service en charge du réseau de distribution d’électricité, le projet ne nécessite aucune extension du réseau mais seulement des travaux à la charge de la pétitionnaire. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance de l’article L. 111-4 du code de l’urbanisme doit être écarté.

32. En huitième lieu, en application de l’article L. 124-2 du code de l’urbanisme, en vigueur à la date de l’arrêté en litige, les cartes communales « délimitent les secteurs où les constructions sont autorisées et les secteurs où les constructions ne sont pas admises, à l'exception de l'adaptation, du changement de destination, de la réfection ou de l'extension des constructions existantes ou des constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs dès lors qu'elles ne sont pas incompatibles avec l'exercice d'une activité agricole, pastorale ou forestière sur le terrain sur lequel elles sont implantées et qu'elles ne portent pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages, à l'exploitation agricole ou forestière et à la mise en valeur des ressources naturelles (…) ». Aux termes de l’article R. 124 3 du même code, alors en vigueur : « Le ou les documents graphiques délimitent les secteurs où les constructions sont autorisées et ceux où les constructions ne peuvent pas être autorisées, à l'exception : (…) 2° Des constructions et installations nécessaires : (…) - à l'exploitation agricole ou forestière (…) ».

33. Il résulte des articles L. 124-2 et R. 124-3 du code de l'urbanisme, désormais repris aux articles L. 161-4 et R. 161-4 de ce code, que les documents graphiques des cartes communales délimitent les secteurs où les constructions ne peuvent être autorisées, à l'exception des constructions et installations nécessaires, notamment, à l'exploitation agricole ou forestière. Pour vérifier que la construction ou l'installation projetée est nécessaire à cette exploitation, l'autorité administrative compétente doit s'assurer au préalable, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de la réalité de l'exploitation agricole ou forestière, au sens de ces dispositions, laquelle est caractérisée par l'exercice effectif d'une activité agricole ou forestière d'une consistance suffisante.

34. Il ressort des pièces du dossier que les parcelles composant le terrain d’assiette du projet en litige sont classées en zone N de la carte communale de Coussay-les-Bois. Il ressort également des pièces du dossier que la SCEA Les Nauds, dont le bétail sera en stabulation dans les bâtiments autorisés par le permis en litige, exerce déjà une activité d’élevage d’environ 300 bovins sur une surface de 235 hectares. En outre, la présence de panneaux photovoltaïques sur le toit des trois bâtiments de stabulation ne remet pas en cause la destination agricole avérée des constructions en cause. Dans ces conditions, le projet doit être regardé comme nécessaire à l’exploitation agricole au sens des dispositions citées au point 32. Dès lors, en délivrant le permis de construire en litige, le préfet n’a pas méconnu les dispositions de l’article L. 124-2 du code de l’urbanisme.

35. En neuvième lieu, il ressort des pièces du dossier qu’à la date de délivrance du permis de construire en litige dans la présente instance, le préfet avait connaissance de l’étude d’impact jointe au dossier de demande d’autorisation d’exploitation au titre des installations classées pour la protection de l’environnement. Celle-ci précise les mesures prévues pour remédier aux éventuelles nuisances olfactives engendrées par le projet. En outre, il n’est pas sérieusement contesté que les habitations les plus proches sont à environ 700 mètres du terrain d’assiette du projet. Dans ces conditions, en délivrant le permis en litige sans l’assortir de prescriptions concernant les éventuelles nuisances olfactives générées par le projet, le préfet n’a pas commis d’erreur manifeste d'appréciation au regard de l’article R. 111-2 du code de l’urbanisme.

36. En dixième lieu, aux termes de l’article R. 111-5 du code de l’urbanisme, en vigueur à la date de l’arrêté en litige : « Le projet peut être refusé sur des terrains qui ne seraient pas desservis par des voies publiques ou privées dans des conditions répondant à son importance ou à la destination des constructions ou des aménagements envisagés, et notamment si les caractéristiques de ces voies rendent difficile la circulation ou l'utilisation des engins de lutte contre l'incendie. / Il peut également être refusé ou n'être accepté que sous réserve de prescriptions spéciales si les accès présentent un risque pour la sécurité des usagers des voies publiques ou pour celle des personnes utilisant ces accès. Cette sécurité doit être appréciée compte tenu, notamment, de la position des accès, de leur configuration ainsi que de la nature et de l'intensité du trafic ».

37. Il ressort des pièces du dossier de demande du permis en litige dans l’instance 17BX02821, versé dans la présente instance et soumis au contradictoire, en particulier des photos 1 et 4 figurant sur la planche PC 7-8, que le chemin desservant le terrain d’assiette du projet global décrit au point 5 depuis la route départementale 725 est carrossable et présente une largeur suffisante pour permettre une desserte du site dans des conditions satisfaisantes. Dans ces conditions, en délivrant le permis en litige, le préfet n’a pas commis d’erreur manifeste d'appréciation au regard de l’article R. 111-5 du code de l’urbanisme.

38. En onzième lieu, aux termes de l’article R. 111-13 du code de l’urbanisme, en vigueur à la date de l’arrêté en litige : « Le projet peut être refusé si, par sa situation ou son importance, il impose, soit la réalisation par la commune d'équipements publics nouveaux hors de proportion avec ses ressources actuelles, soit un surcroît important des dépenses de fonctionnement des services publics ».

39. Si la commune soutient que, concernant la voie de desserte et le raccordement aux réseaux publics d’eau potable, d’électricité et d’assainissement, le projet engendrerait pour elle des dépenses, elle ne fournit toutefois aucun élément à l’appui de ces allégations. Dans ces conditions, en délivrant le permis en litige, le préfet n’a pas commis d’erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l’article R. 111-13 du code de l’urbanisme.

40. En douzième lieu, aux termes de l’article R. 111-14 du code de l’urbanisme, en vigueur à la date de l’arrêté en litige : « En dehors des parties urbanisées des communes, le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature, par sa localisation ou sa destination : / a) A favoriser une urbanisation dispersée incompatible avec la vocation des espaces naturels environnants, en particulier lorsque ceux-ci sont peu équipés (…) ». Aux termes du I de l’article L. 111-1-2 du même code, alors en vigueur : « En l'absence de plan local d'urbanisme ou de carte communale opposable aux tiers, ou de tout document d'urbanisme en tenant lieu, seuls sont autorisés, en dehors des parties actuellement urbanisées de la commune : (…) 2° Les constructions et installations nécessaires à l'exploitation agricole, à des équipements collectifs dès lors qu'elles ne sont pas incompatibles avec l'exercice d'une activité agricole, pastorale ou forestière sur le terrain sur lequel elles sont implantées, à la réalisation d'aires d'accueil ou de terrains de passage des gens du voyage, à la mise en valeur des ressources naturelles et à la réalisation d'opérations d'intérêt national ; / 3° Les constructions et installations incompatibles avec le voisinage des zones habitées (…) ».

41. Si le terrain d’assiette du projet en litige se situe en dehors des parties actuellement urbanisées de la commune, il consiste en la réalisation d’une installation nécessaire à l’exploitation agricole de la SCEA Les Nauds, qui, compte tenu de son importance et des nuisances, notamment olfactives, qu’elle est susceptible d’entraîner, et malgré les règles de distance imposées au titre des installations classées pour la protection de l’environnement, est au surplus incompatible avec le voisinage. Dans ces conditions, en délivrant le permis en litige, le préfet n’a pas commis d’erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l’article R. 111-14 du code de l’urbanisme.

42. En treizième lieu, aux termes de l’article R. 111-15 du code de l’urbanisme, en vigueur à la date de l’arrêté en litige : « Le permis ou la décision prise sur la déclaration préalable doit respecter les préoccupations d'environnement définies aux articles L. 110-1 et L. 110-2 du code de l'environnement. Le projet peut n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si, par son importance, sa situation ou sa destination, il est de nature à avoir des conséquences dommageables pour l'environnement ».

43. L'article R. 111-15 du code de l'urbanisme, repris désormais à l'article R. 111-26 du même code, ne permet pas à l'autorité administrative de refuser un permis de construire, mais seulement de l'accorder sous réserve du respect de prescriptions spéciales relevant de la police de l'urbanisme, telles que celles relatives à l'implantation ou aux caractéristiques des bâtiments et de leurs abords, si le projet de construction est de nature à avoir des conséquences dommageables pour l'environnement. A ce titre, s'il n'appartient pas à cette autorité d'assortir le permis de construire délivré pour une installation classée de prescriptions relatives à son exploitation et aux nuisances qu'elle est susceptible d'occasionner, il lui incombe, en revanche, le cas échéant, de tenir compte des prescriptions édictées au titre de la police des installations classées ou susceptibles de l'être.

44. Ainsi qu’il a été dit, il ressort des pièces du dossier qu’une demande d’autorisation d’exploitation au titre des installations classées pour l’environnement était en cours d’instruction par les services préfectoraux à la date à laquelle le préfet a délivré le permis de construire en litige dans la présente instance. En outre, ainsi qu’il a également été dit, même si le dossier de demande est incomplet sur ce point, il ressort des pièces du dossier que le projet global inclut la réalisation d’un système d’assainissement non collectif. L’arrêté en litige reprend sous forme de prescription l’avis rendu par la direction départementale des territoires selon lequel les travaux ne doivent pas porter sur les parcelles cadastrées section AB n° 7, 8, 9 et 10. Si le terrain d’assiette du projet est inclus dans le périmètre de la zone naturelle d’intérêt écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF) de type 2 « Forêts de la Guerche et de la Groie », l’exclusion des parcelles cadastrées section AB n° 7, 8, 9 et 10 a pour but d’éviter la destruction d’habitats et de sites de reproduction d’espèces protégées. Si le projet se situe dans le périmètre de protection éloigné du captage d’eau potable « Les Landes », ce périmètre correspond seulement à « une zone de vigilance notamment en ce qui concerne la réalisation de forages ou de prélèvements dans les eaux souterraines » et le projet en litige ne prévoit ni forage ni prélèvement. Enfin, si la commune soutient que le bâtiment 1 empiète sur une zone humide, cela ne ressort d’aucune pièce du dossier. Dans ces conditions, en délivrant le permis en litige, le préfet n’a pas commis d’erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l’article R. 111-15 du code de l’urbanisme.

45. Les illégalités relevées aux points 6, 7, 11, 14 et 24 du présent arrêt sont susceptibles de régularisation.

46. Par suite, il y a lieu de surseoir à statuer sur les conclusions de la requête et d’impartir à la pétitionnaire un délai de 4 mois à compter de la notification du présent arrêt aux fins d’obtenir la régularisation de ces vices.

DECIDE :

Article 1er : Il est sursis à statuer sur la légalité de l’arrêté du préfet de la Vienne du 26 mai 2015 jusqu’à l’expiration d’un délai de 4 mois à compter de la notification du présent arrêt pour permettre à la société Technique solaire Invest 9 de notifier le cas échéant à la cour une mesure de régularisation des illégalités mentionnées aux points 6, 7, 11, 14 et 24.

Article 2 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n’est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu’en fin d’instance.


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