21BX00554

Décision du 22 mars 2022

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... et le groupement foncier agricole (GFA) Domaine de Calon ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d’annuler la décision du 5 septembre 2012 par laquelle la commission de classement des crus classés de l’appellation d’origine contrôlée (AOC) « Saint-Emilion grand cru » a refusé le classement de leur exploitation, le Château Corbin Michotte, aux fins d’être autorisée à utiliser la mention « grand cru classé », d’annuler les décisions individuelles de classement figurant dans l’arrêté interministériel du 29 octobre 2012 portant homologation du classement des crus de l’AOC « Saint-Emilion grand cru » et d’ordonner à l’Institut national de l’origine et de la qualité (INAO) ou à l’Etat de produire différentes pièces et échantillons relatifs à l’organisation et au déroulement des opérations de classement.



Par un jugement n° 1300016 du 17 décembre 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leurs demandes.



Par un arrêt no 16BX00657 du 12 avril 2019, la cour administrative d’appel de Bordeaux a rejeté l’appel formé par M. A... et le GFA Domaine de Calon contre ce jugement.



Par une décision du 12 février 2021, le Conseil d’Etat, statuant au contentieux, a, saisi d’un pourvoi présenté par M. A... et le GFA Domaine de Calon, annulé l’arrêt du 12 avril 2019 de la cour en tant qu’il a jugé irrecevables les conclusions présentées par les intéressés tendant à l’annulation de la décision du 5 septembre 2012 refusant le classement de leur exploitation aux fins d’être autorisée à utiliser la mention « grand cru classé » et a renvoyé, dans cette mesure, l’affaire devant la cour.

Procédure devant la cour administrative d’appel :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 16 février 2016, 27 mars 2017, 30 octobre 2017 et 30 octobre 2018, ainsi que par des mémoires enregistrés les 2 juillet, 29 octobre, 1er décembre 2021 et 16 décembre 2021, M. A... et le GFA Domaine de Calon, représentés par la SCP Bauer-Violas Feschotte-Desbois Sebagh, demandent à la cour, dans le dernier état de leurs écritures :

1°) d’annuler le jugement n° 1300016 du tribunal administratif de Bordeaux du 17 décembre 2015 ;

2°) d’annuler la décision du 5 septembre 2012 par laquelle la commission de classement des crus classés de l’AOC « Saint-Emilion grand cru » a refusé le classement de leur exploitation aux fins d’être autorisée à utiliser la mention « grand cru classé » ;

3°) d’enjoindre à l’INAO, ou à l’État, de produire l’identité des échantillons de calage, la totalité des contrats de prestations de service conclus entre Qualisud et les personnes qui ont procédé aux dégustations, avec leurs annexes, ainsi que la date d’élaboration de la grille définitive du classement ;

4°) de mettre à la charge de l’Etat et de l’INAO la somme de 8 000 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.


Considérant ce qui suit :

1. M. A..., gérant de l’exploitation Château Corbin Michotte, et le GFA Domaine de Calon, propriétaire de cette exploitation, ont déposé auprès de l’INAO un dossier de candidature afin de bénéficier de la mention « grand cru classé » de l’AOC « Saint-Emilion grand cru ». A l’issue d’un premier examen de leur candidature par la commission de classement des crus classés de l’appellation, l’INAO les a informés, le 7 juin 2012, que celle-ci n’avait pas été retenue. Les intéressés ont sollicité, le 14 juin 2012, un nouvel examen de leur dossier de candidature. A l’issue de ce second examen, la commission de classement a de nouveau écarté leur candidature, le 5 septembre 2012, et a proposé le lendemain au comité national des appellations d'origine relatives aux vins et aux boissons alcoolisées, et des eaux-de-vie de l’INAO une liste de soixante-quatre crus admis à la mention « grand cru classé », sur laquelle ne figurait pas le Château Corbin Michotte. Après son approbation par le comité national, cette liste a été homologuée par un arrêté du 29 octobre 2012 du ministre de l’agriculture et de l’alimentation et du ministre de l’économie et des finances. M. A... et le GFA Domaine de Calon ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d’annuler la décision du 5 septembre 2012 de la commission de classement ainsi que les décisions individuelles de classement figurant dans l’arrêté interministériel du 29 octobre 2012 et d’ordonner à l’INAO ou à l’État de produire des pièces et échantillons relatifs à l’organisation et au déroulement des opérations de classement. Par un jugement du 17 décembre 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande. Par un arrêt n° 16BX00657 du 12 avril 2019, la cour administrative d’appel de Bordeaux a rejeté l’appel formé par M. A... et le GFA Domaine de Calon. Par une décision du 12 février 2021, le Conseil d’Etat statuant au contentieux a, saisi d’un pourvoi présenté par les intéressés, annulé l’arrêt du 12 avril 2019 de la cour en tant qu’il a jugé irrecevables les conclusions tendant à l’annulation de la décision du 5 septembre 2012 refusant le classement de leur exploitation aux fins d’être autorisée à utiliser la mention « grand cru classé » et a renvoyé, dans cette mesure, l’affaire devant la cour.

Sur l’intervention du Conseil des vins de Saint-Emilion :



2. Aux termes de l’article 2 de ses statuts votés le 28 juin 2007, le Conseil des vins de Saint-Emilion a pour objet « (…) / 1. de défendre les intérêts des A.O.C. Saint-Emilion, Saint-Emilion Grand cru et du classement attaché (…) » et « / 2. d’étudier et de défendre les droits ainsi que les intérêts matériels et moraux, tant collectifs qu’individuels, des personnes visées par ses statuts ». Eu égard à cet objet, le Conseil des vins de Saint-Emilion a intérêt au maintien du jugement attaqué. Par conséquent, son intervention, régulièrement présentée, est recevable.

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. En premier lieu, aux termes de l’article L. 10 du code de justice administrative : « Les jugements sont publics. Ils mentionnent le nom des juges qui les ont rendus ». Aux termes de l’article R. 741-7 du même code : « Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d’appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d’audience ». Contrairement à ce que soutiennent les requérants, il ressort de la minute du jugement attaqué que celle-ci comporte, conformément aux dispositions précitées, le nom de chacun des trois magistrats ayant rendu la décision de première instance, ainsi que la signature du rapporteur, du président de la formation de jugement et du greffier d’audience. Si les requérants soutiennent, en outre, que le jugement attaqué est entaché d’un vice de forme en ce qu’il est dépourvu des mentions permettant de vérifier que la composition de la juridiction était la même lors de l’audience et lors du délibéré, il ressort des mentions portées sur ce jugement, lesquelles font foi jusqu’à preuve du contraire, qu’il a été « délibéré après l’audience publique du 8 décembre 2015 » à laquelle siégeaient les trois magistrats dont les noms ont été précisés. Ces mentions suffisent à établir que la composition de la juridiction était la même tant à l’audience qu’au délibéré.



4. En deuxième lieu, il ressort du point 8 du jugement attaqué que les premiers juges, après avoir relevé que le cahier des charges de l’AOC « Saint-Emilion grand cru » homologué par le décret du 5 décembre 2011 avait modifié certaines dispositions du précédent cahier des charges de ladite appellation, homologué par le décret du 11 février 2011, ont estimé que les modifications apportées n’étaient pas inconciliables avec le règlement de classement adopté par l’arrêté du 6 juin 2011. Le tribunal, qui n’était pas tenu de répondre à l’ensemble des arguments de la demande, a ainsi suffisamment motivé sa réponse au moyen tiré de ce que le règlement de classement homologué par l’arrêté du 6 juin 2011 ne pouvait constituer le fondement réglementaire de la décision contestée.



5. En troisième lieu, il ressort du point 11 du jugement attaqué que les premiers juges, qui n’étaient pas tenus de répondre à l’ensemble des arguments de la demande, ont suffisamment motivé leur réponse au moyen tiré de ce qu’une procédure nationale d’opposition aurait dû être mise en œuvre préalablement à l’homologation du cahier des charges relatif à l’AOC « Saint-Emilion grand cru » par le décret du 5 décembre 2011, en indiquant les raisons pour lesquelles ils estimaient que les modifications apportées à ce cahier des charges ne pouvaient être regardées comme des « modifications majeures » au sens de l’article R. 614-20-1 du code rural et de la pêche maritime.



6. En quatrième lieu, il ressort du point 19 du jugement attaqué que le tribunal a estimé que les règles de quorum ont été respectées et que les membres présents avaient été régulièrement nommés à la commission permanente du comité national des appellations d'origine relatives aux vins et aux boissons alcoolisées et des eaux-de-vie de l'INAO. Les premiers juges, qui n’étaient pas tenus de répondre à l’ensemble des arguments de la demande, ont ainsi suffisamment motivé leur réponse au moyen tiré de ce que la composition de la commission permanente dudit comité n’était pas régulière lors de la séance du 16 juin 2011.

7. En cinquième lieu, si les requérants ont invoqué, en première instance, un moyen auquel il n’a pas été répondu, tiré de ce que la première réunion de la commission de classement a eu lieu avant que ne soient désignés ses membres, il ressort des pièces du dossier que cette réunion n’avait qu’un caractère préparatoire et qu’elle n’a donné lieu à aucune décision ni aucun examen des candidatures. Le tribunal administratif n’était donc pas tenu de répondre à un tel moyen qui était inopérant.



8. En sixième lieu, si les requérants ont invoqué en première instance une violation des principes d’égalité et de transparence, il ressort du jugement attaqué que le tribunal administratif a écarté les moyens ainsi soulevés en indiquant les raisons pour lesquelles il estimait que ces principes n’avaient pas été méconnus. Le tribunal administratif n’était pas tenu de répondre à l’ensemble des arguments invoqués à l’appui du moyen tiré de la violation du principe d’égalité. En particulier, les premiers juges n’étaient pas tenus de répondre à l’argumentation, développée en première instance, selon laquelle un candidat a bénéficié de l’ouverture d’une seconde bouteille de vin lors d’une dégustation, en raison du fait que la première bouteille était bouchonnée, dès lors que cette circonstance n’était pas, en tout état de cause, de nature à caractériser une rupture d’égalité entre les candidats à l’examen dont il s’agissait.



9. En dernier lieu, il est vrai, ainsi que le font valoir les requérants, que le règlement du classement homologué par l’arrêté du 6 juin 2011 détaillait les éléments d’appréciation, tels que « les modes de distribution » ou « l’assiette foncière », pouvant être pris en compte par la commission de classement des crus classés de l’AOC « Saint-Emilion grand cru » afin d’évaluer les quatre principaux critères de notation définis par ce règlement, à savoir, le « niveau de qualité et la constance des vins », la « notoriété », la « caractérisation de l’exploitation » et la « conduite de l’exploitation ». Toutefois, aucun texte ni aucun principe n’obligeait la commission de classement à pondérer ou à noter de manière individualisée ces éléments d’appréciation détaillés, lesquels ne constituaient pas, en eux-mêmes, les quatre critères de notation précités. Les premiers juges n’étaient donc pas tenus de répondre aux moyens tirés de l’absence de notation et de pondération de ces éléments, tels que « les modes de distribution » ou « l’assiette foncière », alors même qu’ils étaient qualifiés de sous-critères par les requérants.

10. Il résulte de tout ce qui précède que le jugement est régulier.

Sur la légalité de la décision du 5 septembre 2012 :

11. En premier lieu, M. A... et le GFA Domaine de Calon soutiennent que les travaux de la commission de classement sont irréguliers dès lors qu’il ressort des termes du rapport de cette commission du 3 septembre 2012 qu’elle s’est réunie, pour la première fois, le 23 mai 2011, avant d'avoir été constituée, le 16 juin 2011, par délibération de la commission permanente du comité national des appellations d'origine relatives aux vins et aux boissons alcoolisées et des eaux-de-vie de l'INAO. Toutefois, ainsi qu’il a été exposé au point 7, il ressort des pièces du dossier que cette réunion n’avait qu’un caractère préparatoire et qu’elle n’a donné lieu à aucune décision ni aucun examen des candidatures qui n’ont été déposées qu’au cours de l’automne 2011. Dès lors, les requérants ne peuvent utilement se prévaloir de cette circonstance pour contester la régularité des opérations de classement.

12. En deuxième lieu, le cahier des charges de l’AOC « Saint-Emilion grand cru » homologué par le décret du 11 février 2011 relatif à l’AOC « Saint-Emilion grand cru » prévoit, au point XII de son chapitre 1er, que l'utilisation des mentions « grand cru classé » ou « premier grand cru classé » est réservée aux exploitations viticoles ayant fait l'objet d'un classement officiel homologué sur lequel ne peuvent figurer que les exploitations viticoles qui répondent aux dispositions d’un règlement fixant les conditions requises pour pouvoir bénéficier de ces mentions, homologué par arrêté conjoint du ministre de l'agriculture et du ministre chargé de la consommation, après avis de l'organisme de défense et de gestion intéressé et sur proposition de l'Institut national de l'origine et de la qualité. En application de ces dispositions, un règlement concernant le classement des « premiers grands crus classés » et des « grands crus classés » de l’AOC « Saint-Emilion grand cru » a été homologué le 6 juin 2011.

13. Les conditions d’édiction d’un acte réglementaire ainsi que les vices de forme et de procédure dont il serait entaché ne peuvent être utilement invoqués que dans le cadre du recours pour excès de pouvoir dirigé contre l’acte réglementaire lui-même et introduit avant l’expiration du délai de recours contentieux. Dès lors, M. A... et le GFA Domaine de Calon ne peuvent, en tout état de cause, utilement se prévaloir, par voie d’exception, de ce que, en application des dispositions de l’article L. 624-20-1 du code rural et de la pêche maritime et des stipulations du règlement (CE) n° 607/2009 de la Commission du 14 juillet 2009, l’adoption d’un nouveau cahier des charges de l’AOC « Saint-Emilion grand cru », par décret du 5 décembre 2011, nécessitait la mise en œuvre d’une procédure nationale d’opposition. De même, est inopérant le moyen, soulevé par voie d’exception, tiré de ce que l’arrêté du 6 juin 2011 homologuant le règlement relatif au classement des « premiers grands crus classés » et des « grands crus classés », qui revêt la nature d’un acte réglementaire, serait illégal en l’absence de saisine régulière, pour avis, de l’organe compétent du Conseil des Vins de Saint-Emilion.

14. En troisième lieu, M. A... et le GFA Domaine de Calon se prévalent de l’irrégularité de la composition, d’une part, du comité national des appellations d'origine relatives aux vins et aux boissons alcoolisées, et des eaux-de-vie de l’INAO lors de ses séances du 10 février 2011, au cours de laquelle a été examiné le projet de règlement de classement et du 6 septembre 2012, lors de laquelle la liste des « premiers grands crus classés » et des « grands crus classés » a été approuvée, d’autre part, de la commission permanente du comité, lors de sa séance du 16 juin 2011, au cours de laquelle les membres de la commission de classement ont été nommés. Toutefois, il ressort des éléments versés au dossier par l’INAO, notamment du règlement intérieur des différentes instances de l’établissement public, des copies des procès-verbaux des délibérations des séances dont s’agit et des feuilles d’émargement, que la composition du comité national et de la commission permanente de ce comité était conforme aux textes en vigueur à la date des séances litigieuses, le quorum ayant été par ailleurs atteint au cours de chacune de ces séances. Dès lors, le moyen doit être écarté.

15. En quatrième lieu, aux termes de l’article 2 du règlement concernant le classement des « premiers grands crus classés » et des « grands crus classés » de l’AOC Saint-Emilion grand cru, homologué par l’arrêté du 6 juin 2011 relatif à ce règlement : « / (…) / Une commission de sept membres dite commission de classement des crus classés de l'appellation Saint-Emilion grand cru est nommée par le comité national des appellations d'origine relatives aux vins et aux boissons alcoolisées, et des eaux-de-vie de l'Institut national de l'origine et de la qualité (INAO), ou par délégation par sa commission permanente. Les membres composant cette commission sont soit des membres du comité national, soit des personnalités extérieures choisies en fonction de leur compétence. / Cette commission est chargée d'organiser les travaux liés au classement et de proposer au comité national des appellations d'origine relatives aux vins et aux boissons alcoolisées, et des eaux-de-vie la liste des grands crus classés et des premiers grands crus classés en vue de son approbation par ledit comité, et avant homologation par arrêté conjoint des ministres chargés de l'agriculture et de la consommation. / Le président de la commission de classement est nommé par le comité national susvisé. / Les membres de la commission n'ont pas d'intérêts directs audit classement. / (…) / La commission de classement fonctionne selon les règles applicables aux commissions d'enquête fixées dans l'article 3 du règlement intérieur de l'INAO. (…) ». Il résulte de ces dispositions qu’afin d’assurer le respect du principe d’impartialité, le règlement homologué le 6 juin 2011 prévoit que les membres de la commission de classement des crus classés de l'appellation Saint-Emilion grand cru, qu’ils soient membre du comité national des appellations d'origine relatives aux vins et aux boissons alcoolisées, et des eaux-de-vie de l’INAO ou des personnalités extérieures, ne doivent pas avoir d’intérêt direct audit classement.

16. Les requérants soutiennent que la décision du 5 septembre 2012 qu’ils contestent est intervenue à l’issue d’une procédure menée en méconnaissance du principe d’impartialité dès lors que MM. D... et M. B..., directement intéressés au classement des crus classés de l'appellation Saint-Emilion grand cru en tant que propriétaire ou copropriétaire de châteaux candidats, étaient également membres du comité national des appellations d’origine relatives aux vins et aux boissons alcoolisées, et des eaux-de-vie de l’INAO, en leur qualité de membres du comité régional vins et eaux-de-vie pour la région sud-ouest et auraient notamment participé aux délibérations du comité national ou de sa commission permanente du 10 février 2011 adoptant le règlement de classement, du 16 juin 2011 procédant à la désignation des membres de la commission de classement et du 6 septembre 2012 approuvant les propositions finales de la commission de classement. A cet égard, M. A... et le GFA Domaine de Calon font état de ce que, par un jugement du 25 octobre 2021, le tribunal correctionnel de Bordeaux a reconnu M. D... coupable du chef de prise illégale d’intérêts en raison de sa participation aux différentes étapes de la procédure de classement et l’a condamné à une amende de 60 000 euros dont 20 000 euros avec sursis.

17. Toutefois, d’une part, le jugement du tribunal correctionnel précise que M. D... n’était pas poursuivi pour trafic d’influence mais pour prise illégale d’intérêts, qu’ainsi le tribunal n’avait pas à rechercher s’il avait été ou non avantagé, le jugement précisant également que l’intérêt de celui-ci dans l’opération n’était pas nécessairement en contradiction avec l’intérêt général. D’autre part, il ressort des termes précités de l’article 2 du règlement concernant le classement des « premiers grands crus classés » et des « grands crus classés » que seuls les sept membres de la commission de classement, dont ne faisaient pas partie M. D... et M. B..., étaient compétents pour organiser les travaux liés au classement et proposer au comité national des appellations d’origine relatives aux vins et aux boissons alcoolisées, et des eaux-de-vie de l’INAO les vins éligibles à ce classement. A cet effet, en application de l’article 6 dudit règlement, la commission s’est appuyée notamment sur les travaux de deux organismes tiers et indépendants en charge respectivement, d'une part, de l'organisation de la dégustation des vins prélevés et, d'autre part, d'assister la commission, à sa demande, notamment pour effectuer des contrôles sur pièces et sur place. Il n’est pas établi que les membres de cette commission, qui ont été désignés par une délibération du 16 juin 2011 de la commission permanente du comité national, aient eu un quelconque intérêt direct ou indirect au classement, conformément à la déclaration d’absence de conflit d’intérêts et de confidentialité que chacun d’entre eux a signée au cours du mois de juin 2011, avant le début des travaux de la commission. La seule circonstance que l’un des membres de la commission, par ailleurs sommelier de son état, a pu participer, le 25 octobre 2010, à un évènement promotionnel réunissant nombre de célébrités et de professionnels du secteur, organisé à l’initiative de M. D..., n’est pas de nature à établir l’existence d’un tel intérêt. Si ce dernier a pu, en sa qualité, notamment, de président de la section Saint-Emilion grand cru du Conseil des vins de Saint-Emilion et de membre du comité national, lequel comptait 60 membres en 2011 et 62 membres en 2012, connaître des différentes versions et projets du règlement de classement, il ne ressort pas des pièces du dossier que les dispositions de ce règlement, qui a été adopté lors de la séance du 10 février 2011 sans participation au vote des représentants intéressés issus de la région bordelaise, dont font partie MM. D... et M. B..., aient eu, en tout ou partie, pour objet ou pour effet d’avantager l’un ou l’autre des candidats au classement. Par ailleurs, il ressort des pièces versées à l’instance que, lors de la séance du 6 septembre 2012 au cours de laquelle le comité national a approuvé les propositions finales de la commission de classement, en vue de leur homologation par arrêté interministériel, les intéressés, à la demande du président du comité national, n’ont participé ni aux débats ni au vote sur ce point. Dans ces conditions, alors que la qualification pénale des agissements de M. D... retenue par le tribunal correctionnel de Bordeaux dans son jugement du 25 octobre 2021 est indépendante de l’appréciation que porte la juridiction de céans sur les conditions dans lesquelles se sont déroulés les travaux organisés par la commission de classement, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision de classement du 5 septembre 2012 serait entachée d’irrégularité au regard du principe d’impartialité.

18. En cinquième lieu, en vertu du XII du cahier des charges de l’AOC « Saint-Emilion grand cru » homologué le 5 décembre 2011, il incombe au règlement de classement de l’AOC de fixer les conditions requises pour pouvoir bénéficier de la mention « grand cru classé » ou « premier grand cru classé ». Aux termes de l’article 6 du règlement de classement homologué par l’arrêté du 6 juin 2011 : « Les critères et pondérations retenus par la commission de classement pour fixer la note des candidats sont les suivants : Pour la mention « grand cru classé » : / 1. Niveau de qualité et constance des vins appréciés par dégustation des échantillons (50% de la note finale) ; / 2. Notoriété appréciée au regard de la valorisation nationale ou internationale du vin de l'exploitation, de la mise en valeur du site, de la promotion et des modes de distribution (20 % de la note finale) ; / 3. Caractérisation de l'exploitation appréciée à partir de l'assiette foncière, de l'homogénéité de ou des entités culturales et de l'analyse topographique et géo-pédologique (20 % de la note finale) ; / 4. Conduite de l'exploitation tant sur le plan viticole que sur celui de l'œnologie appréciée en tenant compte de l'encépagement, de la structuration et de la conduite du vignoble, de la traçabilité parcellaire en vinification et des conditions de vinification et d'élevage (10 % de la note finale). Tout candidat dont la note finale est supérieure ou égale à 14 sur 20 est proposé au classement grand cru classé. (…) ».

19. Il ressort des pièces du dossier que, s’agissant du critère « niveau de qualité et constance des vin », l’organisme Qualisud, désigné par le directeur de L’INAO pour assister la commission de classement dans ses travaux, a été chargé de l’organisation du prélèvement des échantillons, de leur conservation et de la dégustation des vins, laquelle a été assurée par un jury de douze dégustateurs-experts pour chaque session de dégustation, choisis au sein d’un groupe composé de vingt-six dégustateurs-experts préalablement sélectionnés et formés. S’agissant des critères « notoriété », « caractérisation de l’exploitation » et « conduite de l’exploitation », le Bureau Veritas Certification, également désigné par le directeur de l’INAO, s’est vu, quant à lui, confier l’élaboration d’une méthodologie d’évaluation des châteaux candidats au classement, permettant d’analyser ces critères, l’examen des pièces fournies par les candidats au classement pour leur appréciation, ainsi que la réalisation des contrôles sur place et la présentation, à la commission de classement, d’une synthèse de ses travaux. Le Bureau Veritas Certification a ainsi élaboré une grille d’évaluation qui décline chacun des trois critères susmentionnés en « titres », « chapitres », « sous-chapitres » et « items », ces derniers se voyant attribuer une note comprise entre 1 et 5 points.

20. D’une part, les requérants soutiennent que les dispositions de l’article 6 du règlement homologué le 6 juin 2011 n’ont pas permis de garantir une égalité de traitement des candidats en ce qui concerne le critère « niveau de qualité et constance des vin », insuffisamment précis, et de prévoir les conditions de garantie de l’anonymat des bouteilles ainsi que la méthode de préparation des échantillons pour les dégustations, en fonction de la typicité des vins et des terroirs ainsi que des différents types de contenant. Ils soutiennent également que les opérations de dégustation des vins se sont déroulées dans des conditions ne permettant pas d’assurer une telle égalité.

21. Cependant, il ne résulte pas des termes du XII cahier des charges de l’AOC « Saint-Emilion grand cru » que serait exigé du règlement fixant les conditions requises pour pouvoir bénéficier de la mention « grand cru classé » ou « premier grand cru classé » qu’il entre dans un niveau de détail tel que celui dont se prévalent les requérants s’agissant, notamment, du critère « niveau de qualité et constance des vin ». Par ailleurs, il ressort des pièces versées à l’instance que l’organisme Qualisud a précisément défini un protocole de prélèvement précisant l’ordre de mission du préleveur, les modalités d’information des candidats, les engagements pris par le préleveur pour l’exécution de sa mission, le lieu de prélèvement, la désignation des échantillons, le procès-verbal de prélèvement ainsi que les modalités de transport et de stockage. De même, un protocole d’organisation des analyses sensorielles a été validé, précisant la planification des jurys de dégustateurs, l’ordre de passage des échantillons, le nombre de répétitions par millésime, la préparation de la salle de dégustation, la gestion des échantillons afin de garantir leur anonymat ainsi que le relèvement des fiches de dégustation. Les requérants ne produisent aucun élément de nature à établir que ces mesures, validées par la commission de classement, n’auraient pas permis d’assurer une appréciation du niveau de qualité et de constance des vins, dégustés à partir de sept descripteurs pondérés entre eux (teinte, netteté, intensité aromatique, complexité aromatique, harmonie/équilibre, texture/tanins, bouquet final et longueur en bouche), dans des conditions permettant de garantir l’anonymat des échantillons et une stricte égalité entre les candidats, nonobstant l’existence de vins de typicité différente ou de types de contenant distincts. A cet égard, si les intéressés font état de ce qu’un candidat a bénéficié de l’ouverture d’une seconde bouteille de vin lors d’une dégustation, dans la mesure où la première bouteille était bouchonnée, ils n’établissent pas que cette circonstance, à la supposer avérée, aurait eu pour effet d’avantager certains candidats et de nuire à l’appréciation de leur propre candidature. Dans ces conditions, les moyens doivent être écartés.

22. D’autre part, il est constant que le règlement homologué le 6 juin 2011 ne procède pas à une pondération et à une hiérarchisation des sous-critères mis en œuvre pour la notation des critères « notoriété », « caractérisation de l’exploitation » et « conduite de l’exploitation », désignés sous le terme de « chapitres » dans la grille d’évaluation élaborée par le Bureau Veritas Certification. Toutefois, cette circonstance n’interdisait pas à la commission de classement d’affiner ces sous-critères en « sous-chapitres » et « items », eux-mêmes, pour certains, pondérés et hiérarchisés, selon les modalités d’analyse proposées par cet organisme qui, en application de l’article 6 du même règlement, était chargé de l’assister dans ses travaux. Si certains items n’ont pas fait l’objet d’une notation mais d’une simple description, pour permettre une meilleure compréhension de la situation du cru sur le chapitre concerné par l’évaluation, cette circonstance n’est pas de nature à vicier la méthodologie suivie par la commission de classement. Ainsi, contrairement à ce qui est soutenu, les deux items relatifs aux modifications de l’assiette foncière de l’exploitation ayant eu lieu et celles à venir, renseigné à titre purement informatif, n’avait pas à faire obligatoirement l’objet d’une notation dès lors, par ailleurs, que l'homogénéité de la ou des entités culturales ainsi que l'analyse topographique et géo-pédologique, mentionnés par le règlement homologué le 6 juin 2011 au titre du critère « caractérisation de l’exploitation », ont bien été valorisés dans le cadre de la méthodologie d’analyse des candidatures. A cet égard, les requérants n’établissent pas que l’appréciation de la commission de classement et les conseils qui auraient été fournis par cette dernière à d’autres candidats quant à l’homogénéité de leur exploitation, à supposer qu’ils aient réellement été prodigués, auraient permis d’avantager d’autres candidatures au détriment de la leur. De même, si le sous-critère « modes de distribution » mentionné par le règlement au titre du critère « notoriété » n’a pas fait l’objet d’une notation chiffrée, il est constant que, pour l’ensemble des candidats, les modes de distribution mis en œuvre par chaque exploitant ont donné lieu à description et ont, dès lors, valablement été pris en compte par la commission de classement. Dans ces conditions, M. A... et le GFA Domaine de Calon ne sont pas fondés à soutenir qu’en méconnaissance des principes de transparence et d’égalité de traitement entre les candidats, la grille d’évaluation élaborée par le Bureau Veritas Certification se serait irrégulièrement substituée aux critères et sous-critères définis par l’article 6 du règlement homologué le 6 juin 2011.

23. Enfin, contrairement à ce que soutiennent les requérants, qui ne peuvent utilement, à cet égard, se prévaloir des règles issues du droit de la commande publique, il ne résulte d’aucun texte ni d’aucun principe que, préalablement à l’édiction de la décision litigieuse, l’administration aurait été tenue de publier ou de porter à la connaissance des candidats au classement, qui avaient connaissance des critères et sous-critères prévus par le règlement homologué le 6 juin 20011, la grille d’évaluation élaborée par le Bureau Veritas Certification sur laquelle la commission de classement s’est appuyée pour lui permettre d’apprécier les mérites respectifs de chaque candidature. Il ne ressort pas des pièces du dossier que cette grille aurait été communiquée à l’un ou l’autre des candidats préalablement à l’adoption du classement litigieux et qu’il en aurait tiré avantage. De même, si les requérants font état de nombreuses fusions-absorptions de domaines qui auraient été opérées par d’autres candidats en amont du classement, il ressort des pièces du dossier que de telles opérations n’étaient pas prohibées et ont été prises en compte par la commission de classement tant au sein de la grille d’évaluation, au sein de laquelle ont été décrites les modifications de l’assiette foncière de l’exploitation ayant eu lieu et celles à venir, qu’à l’occasion des dégustations, au cours desquelles ont été distingués les différents crus fusionnés ou absorbés. En outre, M. A... et le GFA Domaine de Calon n’établissent pas davantage, ainsi qu’ils l’affirment, que certains candidats au classement n’auraient pas disposé, contrairement aux prescriptions de l’article 5 du règlement homologué le 6 juin 2011, de chais exclusivement réservés à la vinification et à l'élevage des vins issus de l'assiette foncière figurant dans leur dossier de candidature et, en tout état de cause, que ces circonstances auraient préjudicié à un examen sérieux de leur propre candidature. Enfin, il ne ressort ni des termes de l’article XII du cahier des charges de l’AOC « Saint-Emilion grand cru » homologué le 5 décembre 2011 relatif aux règles de présentation et d’étiquetage ni de ceux du règlement de classement homologué le 6 juin 2011 que les candidatures des exploitants ne respectant pas les règles d’étiquetage de l’AOC « Saint-Emilion grand cru », qui ne constituent pas une des conditions de production de cette appellation, auraient dû être écartées dans la mesure où, par ailleurs, leur exploitation répondaient aux conditions de production fixées pour cette AOC. La circonstance que la commission de classement a pu, à l’occasion des opérations de classement en cours, inviter les domaines concernés à mettre l’étiquetage de leurs bouteilles en conformité avec le cahier des charges de l’AOC n’a pu avoir pour conséquence une rupture de l’égalité de traitement entre les candidats dès lors que ce critère n’a pas fait l’objet d’une notation mais d’une simple description. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des principes de transparence et d’égalité de traitement doit être écarté en toutes ses branches.

24. En sixième lieu, aux termes de l’article 6 du règlement de classement homologué par l’arrêté du 6 juin 2011 : « Le choix des millésimes prélevés, identiques pour tous les candidats, est laissé à l'appréciation de la commission, sur une période maximale des dix dernières années pour les candidats en grand cru classé et des quinze dernières années pour les premiers grands crus classés. Tous les millésimes prélevés sont disponibles en bouteilles chez les candidats. (…) ».

25. Il ressort des pièces du dossier que les prélèvements d’échantillons de vin ont eu lieu entre le 22 novembre et le 9 décembre 2011 et ont porté sur les millésimes 2000 à 2009. Si les requérants soutiennent qu’en application des dispositions précitées de l’article 6 du règlement de classement, le choix de la commission de classement aurait dû se porter sur les millésimes 2001 à 2010, il résulte des termes du IX du cahier des charges de l’AOC « Saint-Emilion grand cru » homologué le 5 décembre 2011 que les vins répondant à cette appellation font l’objet d’un élevage au moins jusqu’au 1er février de la deuxième année qui suit celle de la récolte et sont conditionnés en bouteille au plus tôt à compter de cette date. Le millésime le plus récent disponible auprès des candidats, ayant achevé sa période réglementaire minimale d’élevage, était donc, aux dates auxquelles les prélèvements ont été effectués, le millésime 2009. Dès lors, c’est sans méconnaître les dispositions précitées de l’article 6 du règlement homologué le 6 juin 2011 qu’ont été choisis les millésimes 2000 à 2009.

26. En dernier lieu, aux termes de l’article 6 du règlement de classement homologué par l’arrêté du 6 juin 2011 : « (…) Tout candidat dont la note finale est supérieure ou égale à 14 sur 20 est proposé au classement grand cru classé. (…) ».

27. Les requérants soutiennent qu’au regard des critères fixés par le règlement de classement homologué le 6 juin 2011, la note finale de 13,82/20 obtenue par leur exploitation viticole est entachée d’une erreur manifeste d’appréciation.

28. D’une part, s’agissant du critère « notoriété », qui a obtenu la note de 15,61/20 après réexamen de la commission de classement, si M. A... et le GFA Domaine de Calon critiquent le choix fait par la commission de classement de tenir compte uniquement de la valorisation nationale et internationale, dans les guides et la presse, des vins produits au cours des années 2005 à 2009, ils n’établissent pas qu’une prise en compte des années antérieures aurait substantiellement modifié l’appréciation de ce critère au regard de l’exposition de leur exploitation. La circonstance que, s’agissant de l'assiette foncière du cru revendiqué ou de l’utilisation régulière du nom du cru, l’INAO a exigé des renseignements portant sur une période de dix années est sans incidence quant à la période pertinente à prendre en compte pour l’évaluation du critère de la notoriété. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier qu’après réexamen, le Château Corbin Michotte a obtenu la note maximale pour les items « guides nationaux », « presse spécialisée étrangère », « guides étrangers » et « presse spécialisée nationale ». En revanche, les requérants n’ayant pas été en mesure de produire de documents pour les items « presse généraliste nationale » et « presse généraliste étrangère », au titre des millésimes 2006 à 2008, ils ont obtenu pour ces items les notes respectives de 3/5 et de 2/5. Il ne ressort pas des éléments versés à l’instance que, lors de la procédure de réexamen, la commission de classement n’aurait pas tenu compte des éléments complémentaires apportés, lesquels l’ont conduite, au demeurant, à réévaluer la notation accordée au titre de la présence dans les guides et la presse. En outre, contrairement à ce qui est soutenu, il ressort des termes du rapport établi par le Bureau Veritas Certification à l’occasion du nouvel examen de la candidature des intéressés qu’une mesure de la notoriété grand public du cru sur internet a bien été réalisée, à l’instar des autres candidats au classement. Enfin, si les appelants soutiennent que, contrairement à ce qu’a retenu la commission de classement au titre de l’item « hébergement lié à l’activité du cru », qui valorise l’existence d’un hébergement lié à l’activité œnotouristique du cru, ils disposent d’une ancienne maison de bordier aménagée à cette fin, la seule production d’un plan d’architecte daté du 14 novembre 2011 et d’une carte postale adressée à M. A... par l’une de ses connaissances ne permet d’établir ni que ces hébergements ont effectivement été réalisés ni de ce qu’ils auraient été affectés à une activité œnotouristique. Dès lors, les requérants n’établissent pas que la note obtenue au titre du critère « notoriété », qui a été revalorisée après réexamen, serait entachée d’une erreur manifeste.

29. D’autre part, en ce qui concerne le critère « caractérisation de l’exploitation », qui a obtenu la note 14,17/20, les requérants font valoir que les items « pourcentage de sols avec nappe d’eau temporaire moyennement profonde (caractère moyennement rédoxique) », « pourcentage de sols avec nappe d’eau temporaire profonde (caractère faiblement rédoxique) » et « pourcentage sans signe d’hydromorphie », notés chacun à 1/5, aurait dû l’être, respectivement, à 5/5, 2/5 et 2/5 dans la mesure où le Bureau Veritas Certification a procédé à une interprétation erronée de la carte des sols des vignobles de Cornelis Van Leeuwen sur laquelle il a fondé son évaluation. A cet égard, les requérants se prévalent, en se basant sur un rapport établi en juin 2014 par l’entreprise Solenvie, d’une part, de l’imprécision de cette carte liée à son échelle et de son ancienneté, d’autre part d’une assimilation abusive, par la commission de classement, des « zones avec présence de pseudogley » mentionnées dans cette carte en zones présentant un excès d’eau sous forme de nappes, enfin, de la non prise en compte des opérations régulières de drainage qui permettent l’élimination des excès d’eau dans le sol. Toutefois, cette expertise, réalisée postérieurement à l’établissement du classement en litige à la demande des requérants sans que, aux dires même des experts, une cartographie complète et précise du domaine ait pu être réalisée, ne suffit pas à remettre en cause les notes obtenues au titre desdits items alors, au demeurant, que les opérations de drainage régulièrement effectuées, qui tendent à démontrer l’existence d’une hydromorphie des sols, ont été prises en compte par la commission de classement, qui a attribué la note maximale à l’item « drainage quand le terroir le justifie ». En se bornant à faire état de critiques d’ordre général sur l’utilisation de la carte des sols des vignobles, dont il ne ressort pas des pièces du dossier que le Bureau Veritas Certification n’aurait pas tenu compte des nuances et réserves apportées par son auteur, M. A... et le GFA Domaine de Calon n’établissent pas que l’appréciation du caractère hydromorphe de l’assiette de l’exploitation, eu égard au poids des items correspondant au regard de la note globale obtenue, serait entachée d’erreur de fait ou d’une erreur manifeste.

30. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu’il soit besoin d’ordonner les mesures d’instruction sollicitées par M. A... et le GFA Domaine de Calon, que ces derniers ne sont pas fondés à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande.

Sur les frais liés à l’instance :

31. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’Etat et de l’INAO, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, la somme que M. A... et le GFA Domaine de Calon demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de M. A... et le GFA Domaine de Calon, chacun, une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par l’INAO et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : L’intervention du Conseil des vins de Saint-Emilion est admise.

Article 2 : La requête de M. A... et du groupement foncier agricole Domaine de Calon est rejetée.

Article 3 : M. A... versera une somme de 1 500 euros à l’Institut national de l’origine et de la qualité au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.



Article 4 : Le groupement foncier agricole Domaine de Calon versera une somme de 1 500 euros à l’Institut national de l’origine et de la qualité au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

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